The New York Times : Après le retour de Trump à la Maison-Blanche, la SEC américaine retire massivement ses poursuites contre les cryptomonnaies

Titre original : The S.E.C. Was Tough on Crypto. It Pulled Back After Trump Returned to Office

Auteurs originaux : Ben Protess, Andrea Fuller, Sharon LaFraniere, Seamus Hughes, The New York Times

Traduction : Luffy, Foresight News

Une société de cryptomonnaie gérée par les milliardaires frères Winklevoss avait fait face à une poursuite fédérale sévère, mais après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a décidé de suspendre l'examen de l'affaire. Auparavant, la SEC avait également poursuivi Binance, la plus grande plateforme d'échange de cryptomonnaies au monde, mais après l'arrivée du nouveau gouvernement, cette poursuite a été complètement abandonnée. Par ailleurs, après des années de litige avec Ripple Labs, la nouvelle SEC a tenté d'alléger la sanction prononcée par le tribunal contre cette entreprise de cryptomonnaie.

L'enquête du New York Times révèle que ce recul de la SEC dans ces affaires reflète un changement d'attitude global du gouvernement fédéral envers l'industrie des cryptomonnaies après le début du second mandat de Trump. Jamais auparavant un organisme de régulation n'avait retiré à grande échelle plusieurs poursuites contre un même secteur. Pourtant, le New York Times a constaté qu'au moment du retour de Trump, plus de 60 % des affaires liées aux cryptomonnaies en cours à la SEC avaient vu leur traitement assoupli : soit la procédure était suspendue, soit la sanction allégée, soit l'affaire tout simplement abandonnée.

L'enquête souligne également que le retrait des affaires de cryptomonnaie est particulièrement inhabituel. Sous Trump, la proportion d'affaires concernant des entreprises de cryptomonnaie abandonnées par la SEC est bien supérieure à celle des affaires d'autres secteurs. Bien que les circonstances de ces litiges varient, de nombreuses entreprises impliquées partagent un point commun : des liens financiers avec Trump, qui se présente comme le "président des cryptomonnaies".

En tant que principal organisme fédéral chargé de réguler les infractions sur les marchés financiers, la SEC n'enquête désormais plus activement sur aucune entreprise connue pour être liée à Trump. Pour toutes les entreprises ayant collaboré avec les activités de cryptomonnaie de la famille Trump ou ayant soutenu ses campagnes politiques, la SEC a abandonné les poursuites. Les seules affaires de cryptomonnaie restantes concernent désormais des entités peu connues, sans lien apparent avec Trump.

· La SEC a abandonné 7 affaires de cryptomonnaie, dont 5 impliquaient des entreprises ayant des liens connus avec Trump ;

· 7 autres affaires de cryptomonnaie ont été suspendues, ont fait l'objet de propositions de règlement favorables ou ont été traitées avec indulgence, dont 3 impliquaient des entreprises liées à Trump ;

· Il ne reste que 9 affaires non abandonnées, et aucune d'elles n'implique de parties connues pour être liées à Trump.

Dans une déclaration, la SEC a affirmé que le traitement des affaires d'application de la loi sur les cryptomonnaies n'avait jamais été influencé par des préférences politiques, et que ce changement de cap était motivé par des considérations juridiques et politiques, notamment des doutes sur sa propre compétence à réguler le secteur des cryptomonnaies. La SEC a également précisé que, bien avant que Trump ne soutienne l'industrie des cryptomonnaies, les membres républicains actuels s'opposaient déjà fondamentalement à la plupart des poursuites liées aux cryptomonnaies, tout en soulignant que la SEC "accorde une grande importance à la lutte contre la fraude sur les valeurs mobilières et à la protection effective des investisseurs".

Aucune preuve n'indique pour l'instant que le président ait fait pression sur la SEC pour qu'elle fasse preuve de clémence envers certaines entreprises de cryptomonnaie. Le New York Times n'a pas non plus trouvé d'éléments montrant que ces entreprises aient influencé le cours des affaires en versant des dons politiques à Trump ou en concluant des accords commerciaux avec lui ; certains de ces liens financiers ou commerciaux sont même postérieurs à l'ajustement de la gestion des dossiers par la SEC.

Mais le cœur du problème réside dans le fait que Trump est à la fois un acteur du secteur des cryptomonnaies et le principal décideur politique de ce secteur. En tant que président, si ses politiques coïncident étroitement avec ses propres intérêts, cela crée un conflit d'intérêts, d'autant plus que de nombreuses entreprises de cryptomonnaie poursuivies par la SEC lui sont liées, ce qui met en lumière ce conflit.

Au début du second mandat de Trump, la Maison Blanche a publiquement déclaré que le président allait "mettre fin aux actions répressives et à la sur-réglementation qui entravent l'innovation dans les cryptomonnaies". Auparavant, le retrait par la SEC de quelques affaires de cryptomonnaie avait déjà attiré l'attention du public, mais le New York Times, après avoir analysé des milliers de documents judiciaires et mené des dizaines d'entretiens, a découvert que cette année, l'assouplissement de la régulation des cryptomonnaies par la SEC est bien plus important qu'auparavant, et que les alliés de Trump dans le secteur en ont tiré d'énormes bénéfices, des faits qui n'avaient pas encore été révélés dans leur intégralité.

Tous les défendeurs concernés par cette enquête nient toute infraction, beaucoup affirmant qu'ils n'ont été accusés que de manquements procéduraux. Par ailleurs, certaines affaires traitées avec indulgence par la SEC impliquent des entreprises sans lien apparent avec le président.

Paul S. Atkins, nouveau président de la SEC nommé par Trump, a déclaré que l'industrie des cryptomonnaies entrait dans une nouvelle ère, ce qui a été salué par les entreprises du secteur.

La porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, a rejeté l'idée d'un conflit d'intérêts impliquant Trump et sa famille, affirmant que les politiques menées par Trump "tiennent la promesse du président de promouvoir l'innovation, de créer des opportunités économiques pour tous les Américains et d'aider les États-Unis à devenir le centre mondial des cryptomonnaies".

Le gouvernement Trump a totalement assoupli la régulation du secteur des cryptomonnaies, le ministère de la Justice ayant même dissous son département chargé de l'application de la loi sur les cryptomonnaies. Le changement de politique de la SEC cette année constitue un revirement à 180 degrés.

L'analyse du New York Times montre que sous Biden, la SEC lançait en moyenne plus de deux affaires liées aux cryptomonnaies par mois, que ce soit devant les tribunaux fédéraux ou dans son propre système juridique interne. Même lors du premier mandat de Trump, la SEC intentait en moyenne une affaire de cryptomonnaie par mois, dont la très médiatisée affaire Ripple.

En contraste frappant, depuis le retour de Trump, la SEC n'a plus intenté la moindre nouvelle affaire liée aux cryptomonnaies, alors que des dizaines d'affaires concernant d'autres secteurs sont toujours en cours.

Atkins a déclaré dans un communiqué que ces mesures de la SEC visaient simplement à corriger l'attitude trop agressive de l'administration précédente envers l'industrie des cryptomonnaies. Selon lui, la SEC sous Biden utilisait son pouvoir d'application de la loi pour imposer de nouvelles politiques. Il a ajouté : "J'ai clairement indiqué que nous allons complètement abandonner le modèle consistant à remplacer la régulation par l'application de la loi."

Alors que les entreprises de cryptomonnaie se réjouissent de cette nouvelle ère, les avocats chevronnés de la SEC qui avaient mené ces affaires s'inquiètent de la tendance à l'assouplissement de la régulation. Ils craignent que cette institution, fondée pendant la Grande Dépression il y a près d'un siècle pour protéger les investisseurs et maintenir l'ordre sur les marchés, ne voie son relâchement encourager l'industrie des cryptomonnaies, au détriment des consommateurs et au risque de l'ensemble du système financier.

Christopher E. Martin, ancien avocat principal de la SEC et chef de file dans une affaire contre une entreprise de cryptomonnaie, a pris sa retraite après que la SEC a abandonné l'affaire cette année. À propos de l'assouplissement généralisé de la régulation par la SEC, il a déclaré sans détour : "C'est une capitulation totale, c'est jeter les investisseurs dans la gueule du loup."

La fin de la répression réglementaire

Le siège de la Securities and Exchange Commission à Washington

À la fin de l'année dernière, au siège de la SEC à Washington, dont la façade est en verre, les actions de régulation contre les cryptomonnaies étaient quasiment à l'arrêt. Gary Gensler, président de la SEC sous Biden, souhaitait faire avancer plusieurs enquêtes sur les cryptomonnaies, mais son mandat touchait à sa fin.

Peu avant, Trump venait d'annoncer avec sa famille le lancement d'un projet de cryptomonnaie baptisé World Liberty Financial, puis il a été réélu président, ayant déjà publiquement déclaré vouloir limiter les pouvoirs de la SEC.

En réalité, Trump n'a pas toujours soutenu l'industrie des cryptomonnaies. Lors de son premier mandat, il avait déclaré sur Twitter que les cryptomonnaies n'étaient que du vent et pouvaient favoriser des activités illégales comme le trafic de drogue. À l'époque, la SEC avait adopté une attitude de régulation stricte, créant même un département dédié à la répression des infractions dans le secteur des cryptomonnaies et lançant des dizaines de poursuites.

Sous Biden, la régulation de la SEC sur les cryptomonnaies s'est encore renforcée. En 2022, la grande plateforme d'échange FTX s'est effondrée, et la même année, le département de régulation des cryptomonnaies de la SEC a quasiment doublé de taille, son équipe d'avocats et d'experts atteignant environ 50 personnes.

Que ce soit sous Trump ou sous Biden, la SEC a toujours estimé que, puisque les investisseurs pouvaient placer toutes leurs économies dans les cryptomonnaies, ils avaient le droit d'être informés des risques. Mais une question juridique épineuse a toujours tourmenté la SEC : a-t-elle vraiment le pouvoir d'intenter des poursuites contre le secteur des cryptomonnaies ? La réponse dépend de la question de savoir si les cryptomonnaies sont considérées comme des valeurs mobilières, c'est-à-dire des produits dérivés des actions et autres instruments financiers modernes.

La SEC affirme que de nombreuses cryptomonnaies sont en réalité des valeurs mobilières, et que les plateformes d'échange et les courtiers doivent donc s'enregistrer auprès de la SEC, publier des informations détaillées et, pour certains, se soumettre à des audits indépendants. En cas de manquement à ces obligations, la SEC peut engager des poursuites en vertu de la législation sur les valeurs mobilières.

L'industrie des cryptomonnaies rétorque que la plupart des cryptomonnaies ne sont pas des valeurs mobilières, mais des produits financiers spécifiques qui devraient avoir leurs propres règles de régulation, lesquelles n'ont pas encore été définies par la SEC. Summer Mersinger, directrice générale de la Blockchain Association, a déclaré : "Nous ne cherchons pas à échapper à la régulation, nous voulons simplement des règles claires pour opérer."

En 2024, la situation a commencé à évoluer, Trump passant d'une attitude sceptique à une position favorable envers les cryptomonnaies. En juillet de cette année-là, lors d'un discours, il a promis aux acteurs du secteur que la "répression délibérée" allait cesser, et a même déclaré : "Je renverrai Gary Gensler dès mon premier jour de mandat."

Lors de la conférence Bitcoin de 2024 à Nashville, Trump a exprimé son soutien aux cryptomonnaies, rompant avec son scepticisme passé.

La SEC, en tant qu'organisme indépendant, compte cinq commissaires nommés par le président, le président étant généralement aligné sur la politique du gouvernement qui l'a nommé. Le lancement, le règlement ou l'abandon d'une affaire nécessite un vote des commissaires, mais l'enquête est menée par des agents spécialisés. Ce mécanisme permet d'ajuster la régulation avec souplesse, tout en évitant que les changements politiques n'entraînent de brusques revirements réglementaires.

Mais après la victoire de Trump à la présidentielle, l'ambiance à la SEC a radicalement changé. Peu après l'élection, Gensler a annoncé son départ. Le département de régulation des cryptomonnaies, autrefois un tremplin de carrière, est soudain devenu un "cadeau empoisonné".

Selon des sources anonymes, pendant la transition présidentielle, Sanjay Wadhwa, chef de l'application de la loi sous Gensler, a exhorté ses équipes à "faire le travail pour lequel le peuple américain nous paie".

Mais certains employés ont commencé à se désengager. Selon des sources, un cadre du département de régulation des cryptomonnaies a pris de longues vacances sans prévenir, ignorant les courriels liés aux affaires ; un autre a refusé de signer des documents concernant les rares affaires de cryptomonnaie lancées après l'élection ; d'autres ont tout simplement cessé de traiter ces dossiers, paralysant les efforts de Gensler dans la dernière ligne droite.

Victor Suthammanont, qui a travaillé dix ans à la SEC et était conseiller de Gensler pour l'application de la loi avant de partir, a déclaré qu'après deux transitions de gouvernement, les équipes étaient toujours restées professionnelles. "Mais cette fois, c'était complètement différent, l'ambiance interne a changé du tout au tout", a-t-il dit, sans évoquer de cas précis.

Gary Gensler a annoncé sa démission après la réélection de Trump

Après la prestation de serment de Trump, la situation est devenue irréversible. Il a d'abord nommé le commissaire républicain Mark T. Uyeda président par intérim de la SEC, en attendant la confirmation par le Sénat de son candidat Paul S. Atkins. Uyeda s'est toujours opposé à la manière dont la SEC traitait les affaires de cryptomonnaie et a déclaré au New York Times que de nombreuses mesures de Gensler reposaient sur "de nouvelles théories non étayées par la législation en vigueur".

Gensler avait exprimé une opinion diamétralement opposée dans un discours en 2022 : "Même avec l'apparition de nouvelles technologies, la législation actuelle ne devient pas caduque."

En février 2025, Uyeda a transféré Jorge G. Tenreiro du poste de responsable des litiges de la SEC. Tenreiro avait dirigé le département de régulation des cryptomonnaies et supervisé de nombreux dossiers, mais il a été muté au département des technologies de l'information, une rétrogradation perçue comme humiliante au sein de la SEC.

Après le départ de Tenreiro, la SEC a commencé à cesser d'enquêter sur plusieurs entreprises de cryptomonnaie susceptibles d'être poursuivies. Bien que certaines enquêtes se poursuivent, au moins 10 entreprises ont annoncé publiquement ne plus faire l'objet d'enquête de la part de la SEC, dont une la semaine dernière.

Pas de marge de négociation

Mark T. Uyeda est l'un des commissaires républicains de la SEC et a assuré la présidence par intérim avant la confirmation d'Atkins par le Sénat.

Uyeda a rapidement été confronté à un problème plus épineux : comment traiter les affaires de cryptomonnaie héritées de l'administration Biden et encore en cours. Il est courant que la SEC suspende des enquêtes, mais il est extrêmement rare qu'elle abandonne des affaires en cours, ce qui nécessite un vote des commissaires.

Coinbase, la plus grande plateforme d'échange de cryptomonnaies des États-Unis, a été poursuivie par la SEC pour ne pas s'être enregistrée. Cette affaire très suivie a vu Coinbase, sous Biden, adopter une défense agressive et convaincre le juge d'autoriser un examen préalable par une cour supérieure.

Désormais sous contrôle républicain, la SEC a vu Coinbase devenir l'une des premières entreprises à demander l'abandon de l'affaire. Habituellement, le bureau du président de la SEC ne s'implique pas dans la négociation de ce type d'affaires, qui est gérée par les avocats spécialisés. Mais cette fois, des membres du bureau d'Uyeda ont participé à certaines négociations avec les avocats de Coinbase.

Paul Grewal, directeur juridique de Coinbase et ancien juge fédéral, a déclaré en interview : "Nous avons toujours veillé à informer en temps réel le bureau du président sortant de l'état des négociations, afin qu'il soit pleinement au courant." Uyeda a affirmé que la participation de ses collaborateurs à ces réunions était "parfaitement conforme aux règles".

Au départ, la SEC dirigée par Uyeda ne voulait pas abandonner complètement l'affaire. Selon des sources, la première proposition de la SEC était simplement de suspendre la procédure, mais Coinbase a refusé.

La SEC a alors fait une plus grande concession, proposant d'abandonner l'affaire tout en se réservant le droit de la relancer si la direction changeait d'avis, mais cette proposition a également été rejetée par Coinbase. Grewal a déclaré fermement : "Notre position est très claire : soit ils abandonnent complètement, soit nous poursuivons la procédure, il n'y a pas de place pour la négociation."

Finalement, la SEC a cédé. À ce moment-là, Gensler et deux commissaires démocrates avaient déjà quitté la commission, qui ne comptait plus que deux républicains et une démocrate.

Uyeda n'a pas commenté cette décision spécifique, mais il a déclaré : "Il n'est pas approprié de poursuivre ce type d'affaires, surtout si la SEC risque de ne plus reconnaître à court terme la théorie juridique sur laquelle elles reposent."

La seule commissaire démocrate restante, Caroline A. Crenshaw, a déclaré en interview que la position de la SEC donnait un avantage considérable à l'industrie des cryptomonnaies : "Ils peuvent pratiquement faire ce qu'ils veulent sans en subir les conséquences."

Changement d'attitude

Caroline A. Crenshaw est la seule commissaire démocrate de la SEC

Après l'abandon de l'affaire Coinbase, l'industrie des cryptomonnaies y a vu un signe de compromis de la part de la SEC. Les avocats d'autres entreprises ont suivi l'exemple, cherchant à obtenir des résultats similaires pour leurs clients. Fin mai, la SEC avait déjà abandonné six autres affaires liées aux cryptomonnaies.

L'analyse des dossiers judiciaires par le New York Times montre que ce phénomène est très inhabituel. Sous Biden, la SEC n'a jamais abandonné d'elle-même une affaire de cryptomonnaie héritée du premier mandat de Trump. Seuls le décès d'un défendeur et une décision défavorable d'un juge ont conduit à l'abandon d'une affaire et d'une partie d'une autre.

Mais après le retour de Trump, la SEC a abandonné 33 % des affaires de cryptomonnaie héritées de l'ère Biden, alors que le taux d'abandon pour les autres secteurs n'est que de 4 %.

Bien que la SEC ait réaffirmé son engagement à poursuivre la fraude sur les valeurs mobilières, elle a tout de même abandonné la poursuite contre Binance. Auparavant, la SEC accusait deux filiales de Binance de fraude, affirmant qu'elles avaient trompé les consommateurs sur la prévention de la manipulation des transactions.

De plus, la SEC a demandé au tribunal de suspendre la procédure pour l'affaire de fraude contre Justin Sun et la Tron Foundation qu'il a fondée. Quatre affaires de ce type sont actuellement suspendues en vue d'un règlement, et la SEC n'a pas encore communiqué sur la suite donnée à cette affaire.

Le gouvernement Trump a hérité de 23 affaires de cryptomonnaie, dont 21 issues de l'ère Biden et 2 du premier mandat de Trump, et la SEC a assoupli le traitement de 14 d'entre elles. Parmi ces 14 affaires, 8 impliquaient des entreprises ayant établi des liens avec Trump ou sa famille avant ou après le traitement du dossier.

Liens entre les entreprises de cryptomonnaie et Trump ou les entreprises familiales Trump

Par exemple, Justin Sun a dépensé 75 millions de dollars pour acheter des tokens émis par World Liberty Financial. La Tron Foundation n'a pas répondu aux demandes de commentaires des journalistes, mais Justin Sun et la Tron Foundation ont déclaré dans des documents judiciaires que la SEC n'avait pas de preuves de fraude et n'avait pas le droit de les poursuivre.

Quelques semaines avant l'abandon de l'affaire Binance, l'entreprise a participé à une transaction commerciale de 2 milliards de dollars utilisant le stablecoin émis par World Liberty Financial. Cette opération devrait rapporter chaque année plusieurs dizaines de millions de dollars à la famille Trump.

Un porte-parole de World Liberty Financial a déclaré que "l'entreprise n'a aucun lien avec le gouvernement américain" et "n'influence en rien l'élaboration des politiques ou les processus décisionnels du gouvernement". Binance a affirmé dans un communiqué que la poursuite de la SEC était "une attaque ciblée contre l'industrie des cryptomonnaies".

En mars 2025, la SEC a abandonné les poursuites contre le courtier en cryptomonnaies Cumberland pour exercice illégal d'activités de valeurs mobilières sans enregistrement. Environ deux mois plus tard, la maison mère de Cumberland, DRW, a investi près de 100 millions de dollars dans la société de médias de la famille Trump. Les dirigeants de DRW affirment que l'opportunité d'investissement s'est présentée après l'abandon de l'affaire, et que la SEC a abandonné la poursuite uniquement en raison du manque de fondement des accusations.

Ripple avait fait don de près de 5 millions de dollars à la cérémonie d'investiture de Trump et s'est également retrouvée au cœur d'un litige. Lors du premier mandat de Trump, la SEC a accusé Ripple de ne pas avoir divulgué d'informations clés lors de l'émission de tokens. L'année dernière, un juge fédéral a rejeté une partie des accusations de la SEC, mais a tout de même condamné Ripple pour violation des lois sur les valeurs mobilières et à une amende de 125 millions de dollars.

Après le retour de Trump, la SEC a tenté de réduire l'amende à 50 millions de dollars. Le juge a sévèrement critiqué ce revirement et rejeté la demande. Ripple a plaidé devant le juge qu'elle méritait une sanction plus clémente, en partie parce que la SEC avait abandonné plusieurs affaires similaires par la suite. Finalement, Ripple a payé l'amende dans son intégralité. En juillet de cette année, la société de médias de la famille Trump a annoncé son intention d'inclure la cryptomonnaie émise par Ripple dans l'un de ses fonds d'investissement ouverts au public.

Hester Peirce, commissaire républicaine de la SEC et responsable du nouveau groupe de travail sur les cryptomonnaies, a déclaré en interview que l'abandon de nombreuses affaires de cryptomonnaie visait à corriger les erreurs du passé, ces affaires n'auraient jamais dû être lancées.

Elle a déclaré : "Je pense que les véritables excès ont eu lieu ces dernières années, lorsque la SEC a intenté de nombreuses affaires sans base légale." Elle a ajouté que ces poursuites avaient freiné l'innovation légitime du secteur. Peirce a souligné que le traitement des affaires était basé uniquement sur les faits et les circonstances, sans tenir compte des "relations personnelles des parties concernées", et sans aucune considération politique ou économique.

Des moyens financiers considérables

Dans l'industrie des cryptomonnaies, peu de personnes sont plus proches de Trump que les frères Tyler et Cameron Winklevoss. Ils ont fondé et dirigent Gemini Trust, une société de cryptomonnaie. Ils ont non seulement soutenu financièrement le comité de collecte de fonds pour la réélection de Trump et d'autres organisations républicaines, mais ont également financé la rénovation de la salle de réception favorite de Trump à la Maison Blanche. Ils ont aussi soutenu financièrement un club privé haut de gamme à Washington, Executive Branch, dont Donald Trump Jr. est l'un des actionnaires.

Leur société d'investissement a récemment injecté des fonds dans American Bitcoin, une nouvelle entreprise de minage de cryptomonnaie. Eric Trump, le deuxième fils de Trump, est cofondateur et directeur de la stratégie de cette société, et Donald Trump Jr. y a également investi.

Liens entre les frères Winklevoss et la famille Trump

Trump a publiquement complimenté les deux frères à plusieurs reprises, les qualifiant de "personnes à la fois intelligentes et belles". Lors d'un événement à la Maison Blanche, il a déclaré : "Ils sont beaux, intelligents et immensément riches."

Mais Gemini Trust a également été impliquée dans des litiges.

En décembre 2020, Gemini Trust a conclu un partenariat avec Genesis Global Capital pour offrir à ses clients la possibilité de prêter leurs actifs numériques à Genesis, qui les prêtait ensuite à de plus grands investisseurs institutionnels.

Genesis versait des intérêts aux utilisateurs et leur promettait de pouvoir retirer leurs fonds à tout moment ; Gemini, en tant qu'intermédiaire, percevait une commission. Gemini a fait la promotion de ce projet en promettant un rendement annuel pouvant atteindre 8 % pour les titulaires de compte.

Peter Chen, data scientist à San Diego, a déclaré en interview qu'il avait investi plus de 70 000 dollars dans ce projet en raison de sa confiance dans Gemini.

"Gemini m'a donné l'impression d'être une entreprise conforme et rigoureuse, l'une des plus réglementées du secteur des cryptomonnaies", se souvient-il.

Peter Chen explique qu'il a investi plus de 70 000 dollars chez Genesis parce qu'il faisait confiance à Gemini Trust.

Cependant, fin 2022, Genesis a fait faillite, gelant les comptes de 230 000 clients.

Une grand-mère de 73 ans a supplié Gemini de lui rendre les 199 000 dollars de ses économies de toute une vie. Selon les documents d'une plainte déposée par le régulateur de l'État de New York, elle a écrit : "Sans cet argent, je n'ai plus rien."

En mai 2024, Genesis a conclu un accord de 2 milliards de dollars avec le régulateur de l'État de New York, permettant aux clients de récupérer leurs fonds. Gemini a également conclu un accord avec l'État de New York, s'engageant à verser jusqu'à 50 millions de dollars si nécessaire pour couvrir les pertes restantes des clients. Gemini affirme n'avoir commis aucune faute, attribuant la crise à Genesis et soulignant qu'aucun client n'a finalement subi de perte.

Mais la SEC a également poursuivi les deux sociétés, les accusant d'avoir émis des actifs numériques sans enregistrement. Tyler Winklevoss a qualifié cette poursuite de "fausse accusation délibérée" sur les réseaux sociaux.

Genesis a choisi de régler avec la SEC, mais Gemini a persisté dans sa défense jusqu'à ce qu'en avril 2025, la SEC propose soudainement de suspendre la procédure pour permettre une négociation. En septembre de la même année, la SEC a annoncé avoir conclu un accord avec Gemini, qui doit encore être approuvé par un vote des commissaires.

La SEC a déclaré au juge fédéral chargé de l'affaire que cet accord "mettra définitivement fin à ce litige".